Les Procureurs de France s’intéressent assez fréquemment à l’organisation, par les conducteurs, de système tendant à contourner les moyens de constatation des infractions.
La dernière affaire en date, à Rodez, verra la juridiction correctionnelle rendre sa décision début décembre. Il s’agissait ici de poursuivre les personnes à l’origine d’une page hébergé sur un réseau social fort connu, que le Parquet estime dédiée au signalement des activités policières de contrôle routier (vitesse, alcool etc.), en infraction avec la loi, étant considéré que la nature de cette loi reste à déterminer.
Curieusement, pourtant, et n’en déplaise au Ministère Public, le code de la route, s’il a prévu d’interdire ce que l’on appelle communément les « détecteurs de radars », n’a jamais envisagé la poursuite de systèmes immatériels de détection.
Ainsi, l’article R. 413-15 paraît inadapté pour pouvoir entrer en voie de condamnation contre ceux qui, ayant recours à la communication communautaire, mettent en ligne des bases de données en temps réel qui permettent, à ceux qui voudraient en user à cette fin, de se soustraire au contrôle, alors que précédemment, certains appareils transportés, dont il a été convenu de réduire la précision, pouvaient y être assimilés.
La notion de bande organisée, ou bien celle d’association de malfaiteurs, affleure dans l’approche que les Parquets font de la question, mais là encore, la loi n’a pas entendu rapprocher ces concepts de ces pratiques nouvelles orientées vers l’offre de moyens permettant, le cas échéant, de commettre des délits, dans l’impunité.
Il est un fait que les actions de Police et de Gendarmerie en matière de circulation routière sont, jusqu’à ce jour, (ce qui change maintenant…) assez visibles, et par conséquent détectables. On y voit sans doute le souhait de faire de la présence des forces de l’ordre, un moyen de minimiser les infractions.
Si les contrôles s’affichent, pourquoi interdire aux uns et aux autres d’en parler, et surtout à ceux qui, nombreux, n’ont rien à se reprocher ! Car signaler le radar, est-ce faire une manœuvre univoque de préparation du délit ? Est-ce même le faciliter ? Ce n’est finalement permettre qu’à celui qui aurait pu le commettre, dûment averti, de ne pas le commettre. La sécurité routière devrait s’en féliciter, car la peur du Gendarme est le début de la sagesse.
Il faudra que soit un jour réglée cette question du partage d’information, d’autant plus que certains moyens de détection devenant furtifs, la question de la collecte de données et de leur partage aura pris une dimension essentielle.
Que penser d’un site internet qui fera le catalogue des voitures à radar embarqué ? Pour l’heure, tout ceci demeure une question d’ordre psychologique : faut-il accepter que certains conducteurs affichent de ne pas se soumettre aux raisons de la politique en matière de circulation routière ? Heurt entre les anciens et les modernes, entre la vitesse symbole de modernité et cette même vitesse, symbole d’errance coupable.
Xavier MORIN Docteur en Droit Avocat au Barreau de Paris